De la Révolution aux années Trente

Publié le par Jules Aimé

Prises de notes Cours Magistral de Spécialité contemporaine.


De la Révolution aux années Trente
 

Introduction :

            Quelles sont les bornes de l’histoire contemporaine ? Question récurrente de notre historiographie.

Le début de la période :

-       1789, début de la Révolution Française, l’ouvrage Nouvelle Histoire de la France contemporaine commence en 1789.

-       1815, échec définitif du premier Empire et début consécutif de la seconde restauration. L’ordre en Europe est changé notamment grâce aux grands accords multipartites. Les Anglais préfèrent eux commencer dès 1814,cela ne changeant évidemment pas grand chose.

-       1830, Le Printemps des Peuples entre échecs et succès.

-       1848, date franco-française choisie par Théodore Rodling pour le début de la période contemporaine. Mise en place de la seconde république, du suffrage universel masculin (première à l’échelle d’un pays).

 

Tous ses points de départ ont leurs défenseurs, mais nous nous accordons de nos jours à placer le début de la période en 1815, jugeant entre autres que la Révolution est une période trop féconde en faits historiques pour être accolée à la période strictement contemporaine.  

 

La fin de la période :

 

            Cette fin est différente de l’histoire immédiate. On s’accorde sur le laps de temps couvert par une génération pour la clôturer.

            Selon les démographes, une génération couvre une trentaine d’année. Mais une période de trente ans nous exclu de l’étude de certaines archives (ex : secret médical).

            Selon l’histoire culturelle qui juge sur des événement parfois extérieur à l’histoire. Une génération ne comprend que cinq années, le temps d’un cycle d’études universitaires. La difficulté se trouve ici dans le contenu des manuels qui diffère parfois seulement d’une année entre l’écoulement des faits et la parution de l’ouvrage, on se rapproche du fait politique ou de l’événementiel.

 

La création de l’histoire contemporaine.

 

            Dans le domaine institutionnel, les premières chairs d’université (poste de professeur) en histoire contemporaine apparaissent en 1879, elles s’intitulent alors « Chair d’histoire moderne et contemporaine ». Elles sont créées par les gouvernements républicains pour « conforter l’histoire républicaine », l’enjeux étant alors la définition de la Révolution et « la ligne de démarcation » intellectuelle entre républicains, monarchistes et bonapartistes.

ð    Les Historiens conservateurs. Caractérisés par Taine et son ouvrage : Les Origines de la France Contemporaine paru en 1875. Taine représente la « Société d’Histoire Contemporaine » elle regroupait ce que l’on appelle les « Érudits Locaux », les Aristocrates désoeuvrés (ils trouvent alors un sens à leur vie dans la recherche historique et leur identité), les Catholiques traditionalistes (ex : Mg Pie évêque de Poitiers).

Cette société reçoit alors le secours de l’école libre de Sciences Politiques  (ancêtre de la grande école parisienne) qui, créée par Émile Boutmy à la suite du désastre militaire et politique de Sedan en 1870 nécessite une grande réflexion et un renouveau politique.  Ce courant se situe à droite sur l’échiquier politique républicain.

 

ð    Les Historiens Républicains.

 

-       Ils ripostent dès 1882 avec la généralisation des manuels en s’appuyant sur les instructions officielles. Par exemple, Ernest Lavisse (enseignent à la Sorbonne) qui est le maître de l’école républicaine avec Charles Seignobos. Lavisse dirige ainsi une Histoire de la France contemporaine en dix volumes de 1788 à 1919.

-       Ils assurent la promotion de l’histoire scientifique (on parle des historiens positivistes, méthodistes ou scientifiques), une histoire qui établit des normes :

On ne peut étudier l’histoire trop proche : il s’agit là plus de politique que d’histoire à proprement dit.

Pour faire de l’histoire, on a besoin de sources. (nos évidences n’en étaient alors pas…)

Ils se regroupent en association et fondent la « Société d’Histoire Moderne » qui publie La revue d’histoire Moderne et Contemporaine ainsi que L’introduction aux études historiques. Publiée en 1898, ce travail commence par cette phrase:

« L’histoire se fait avec les documents » , « les documents sont les traces, qu’ont laissé les pensées et les actes des documents d’autrefois ».

Ce mouvement est quant à lui encouragé par l’État grâce à la création :

-      L’École des Chartes.

-     Le Comité des Travaux Historiques et Scientifiques (CTHS), divisé en sections dont celle du « Temps Présenté, celle qui nous intéresse

Dans les années 1880 le Positivisme triomphe en histoire contemporaine notamment grâce à l’action de Gabriel Monod (créateur en 1876 de la Revue Historique). C’est aussi le triomphe de l’événementiel et de l’histoire politique.

I ) L’événement

On assiste au cours de la période étudiée à une démocratisation de l’histoire. Elle résulte entre autres de « l’irruption des masses ».

La nouveauté se fait vers 1870-1880 avec la prise de conscience collective que « chacun vît dans un régime d’historicité ». Pour la première fois, les hommes et les femmes se voient comment vivant au XIXème siècle. Avant, cela ne se faisait pas, on se sentait vivre sous un roi, pas dans un siècle. Ce qui nous semble banal de nos jours, fut alors une véritable révolution historique.

Pour les historiens, l’événement appartient désormais au passé comme au présent.

A)   Production de l’événement

Les médias ont depuis 1860 le monopole de l’histoire : c’est pas eux que l’événement nous est connu. (ex : Le grand bon en avant (=> Chine de Mao) n’étant pas été relayé par les médias en son temps est une sorte de non événement historique, il n’a pas eu de répercussion dans l’histoire).

À un type d’événement correspond un type de moyen de communication :

-       La presse écrite (Affaire Dreyfus).

-       La Radio (appel du 18 juin).

-       La télévision (le scandale du Watergate ou plus récemment d’Outreau).

Pour les historiens Américains, la télé reste un média « froid », il n’assure pas une permanence à l’inverse de la rumeur. Il faut assurer la promotion de l’immédiat. (=> thèse : L’invention de la Vitesse sujet concernant le XIXème).

B)   La métamorphose de l’événement

L’événement se rapproche de nos jours plus du « fait-divers ». Ainsi le suicide de Marilyn Monroe devient un événement car des millions de personnes ont vu en lui un drame (star-system). Mai 68 à aussi relevé de 23 interprétations historiques différentes.

 

            L’événement contemporain dépend du message proposé : il est de moins en moins bavard… Nous avons ainsi de plus en plus d’images et de moins en moins d’analyses et de critiques. L’imaginaire peut donc s’emparer de l’événement (mort de Lady Di comme le Tsunami par exemple).

 

            Le « direct » transforme l’événement en spectacle (la société du paraître plus de l’être). L’exemple le plus significatifs pouvant être l’alunage de Neil Armstrong, réunissant des milliards de téléspectateurs tout en en écartant la Chine Maoïste. 

C)   Le paradoxe de l’événement

L’immédiateté ou la difficulté d’analyser un événement. La mort de Kennedy est comprise immédiatement sans pour autant répondre aux questions quelle sous-entend ni faire la place aux critiques.

Qu’est-ce qu’un événement ? À qui est-il destiné ? Pourquoi leur est-il destiné ?

    Nous sommes aujourd’hui dans la paradoxale situation de la surinformation perpétuelle et de la sous-information chronique. Nous sommes noyé sous le flot de nouvelle et perdu par l’absence d’analyse de fond. L’exemple le plus récent étant celui du Tsunami, dont on ignore aujourd’hui les conséquences indirectes. A l’inverse, l’épidémie de Choléra qui frappa la France en 1832 (la Peur Bleue, expression due à la couleur que la peau des malades prenait). La presse relatait alors de nombreux débat de fond, sur les épidémies, transmissions, luttes… Plus récemment, la rage n’a pas vu /se dégager de débats de fond, juste du fait-divers.

 

Conclusion.

L’événement d’aujourd’hui est celui des positivistes.

L’historien ne s’intéresse pas vraiment à la création de l’événement mais au système de signification de celui-ci. On travaille plus sur les conséquences que sur le fait déclencheur.

L’historien doit faire surgir le passé dans le présent. Faire revivre le passé.

II Les chantiers et les sources 

Pour connaître les tendances historiques du moment, il faut se concentrer sur les Congrès internationaux d’histoire. Le dernier ayant eu lieu à Oslo en 2002. Il s’en est dégagé onze thèmes de réflexion.

Mondialisation de l’Histoire, l’Histoire est-elle un produit, l’Histoire universelle est-elle possible (peut-on résumer l’histoire des hommes dans un ouvrage de 500 pages ?),  comment peut-on favoriser les rencontres des cultures entre les différents continents ?

Temps et Histoire, qu’est-ce que le temps pour l’historien, qu’elle est la construction historique du temps (temps social, temps professionnel, temps indicatif…). Les visions du futur selon les sociétés.

Usages et Responsabilité de l’historien ou de l’Histoire. L’abus de mémoire, la mémoire s’oppose-t-elle à l’Histoire, chaque communauté à-t-elle une histoire. Les expertises des historiens, procès (ex : Papon), l’historien doit-il répondre à toutes les sollicitations, peut-on instrumentaliser l’Histoire ?

Bilan historiographique du XXème siècle. Siècle des extrêmes, qu’a-t-on produit ?

Mémoire collective et identité. Comment les sociétés construisent-elles leur passé, quels sont leurs personnages clés, leurs grands événements. 

Les découvertes scientifiques. Les français sont peu présent dans ce thème hormis Bruno Latour qui à travaillé sur les erreurs de la science (relève peut-êtr eplus de la sociologie que de l’histoire). 

La justice. Les normes, comment se construisent-elles, comment se développent-elles, qu’elles sont les déviances de la justice.

L’histoire religieuse et les rapports homme/femme. L’évolution des pratiques religieuses, l’assimilation des progrès scientifiques par les religions, qu’est-ce que la masculinité ?

Régions et Régionalisme. Qu’est-ce qu’une région à l’échelle mondiale ?

Pratique sociale de l’écriture et de la lecture. Les évolutions, les différences entre les sociétés (lecture à voix haute, mémorisation, analphabétisme…)

Nouvelles approches de l’Histoire. Les représentations historiques.

Remarques de conclusion :

            Aujourd’hui les sources bénéficient de statuts multiples.

        -La démarche archivistique, la conservation des sources de gouvernement puis de toutes les institutions.
        
-L’usage politique ou administratif des sources.
     -L’usage scientifique des sources (rassembler la documentation, la critiquer, l’interroger, la mettre en forme, écrire l’histoire).
        -L’usage patrimonial, utilisé pour l’enseignement et l’entretien de la mémoire collective. Travail par exemple sur le rôle de l’historien entre les descendants de victime d’Oradour sur Glanes et les descendants des « Malgrés-nous » ces soldats alsaciens contraint de servir dans les rangs de la SS. C’est à l’historien de juger.

 

Les Sources Judiciaires
 

Introduction :

            Les sources judiciaires sont l’ensemble des documents qui se rapportent à la justice, qui traitent du rythme d’activité des tribunaux, des infractions ou même des suicides (sujet de trois mémoires à Poitiers). Les sources judiciaires ne sont pas toutes en libre accès, les archives sont communicables que 100 ans après la date de l’acte ou la clôture du dossier. Pour les dossiers du personnel judiciaire, il faut attendre 120 ans de délais. Si dans ces dossiers il y a un élément à caractère médical (dossier psychiatrique par exemple) on rallonge les délais à 150 ans.

            Les sources judiciaires ont été relativement peu utilisées par les historiens de l’époque contemporaine. Mais de beaux travaux ont été publiés ces dernières années (ex : les parricides). L’origine de l’engouement pour les archives judiciaires possède trois points de départs.

            -C’est d’abord une revue : les annales de Normandie (=> Pierre Chanu). Dans les années 1970, les historiens modernistes s’intéressent plus aux faits judicaires qu’a leur collègue de contemporaine. Arlette Farge écrit le Goût de l’Archive, Nicole et Yves Castan travaille sur le sentiment d’honnêteté et sont amenés à travailler les sources judiciaires.

-Louis Chevalier professeur au Collège de France publie en 1958 Classes laborieuses, Classes dangereuses, il s’intéresse au crime. Le contenu de son ouvrage nous révèle l’existence d’une pathologie Urbaine, le Crime. Il rend légitime l’histoire de la criminalité.

-Les travaux sur les prison, 1975, plusieurs travaux sont publiés. Pierre Deyon (historien régionaliste) se questionne sur les prisonniers, les lieux d’incarcération, la cause de l’enfermement ?.. Michel Foucault en 1975 publie « Surveiller et Punir » ou l’histoire de l’incarcération. Elles sont, dit-il, le reflet d’une société. À la fin de l’Ancien régime, on assistait aux supplices spectacles, ils permettaient de légitimer la force. Ils seront remplacés par les prisons passant ainsi de la punition corporelle à une punition psychique.

III La production des sources

            Il faut toujours s’interroger sur la production des sources ; sur la manière dont elles nous sont parvenues. Pour comprendre la création des sources, il faut connaître le fonctionnement de la Justice.

A)   le Fonctionnement de la Justice 

            Le Système Juridictionnel

La justice actuelle est née de la Révolution et du 1er Empire. Les tribunaux se mettent en place en 1790. On rompt avec l’Ancien régime, avec des législations différentes d’un comté à l’autre. En 1790, il n’existe plus qu’une seule règle, la même pour tous et pour tout le territoire, il s’agit des lois du 16 et 24 août.

Entre l’intervalle 1790 et 1810, on a tout réinventé en matière de justice. La loi de 1810 à tout mis en place. Robert Badinter à même remis en place l’Appel en Court d’Assise alors même qu’il avait été supprimé en 1810. Le tribunal de grande instance (TGI) à lui été mis en place en 1958 dans le contexte délicat du changement de république.

On distingue deux types de juridictions, celles de l’ordre judiciaires et celles de l’ordre administratif : Conseil d’État, Tribunaux Administratifs, la Cour des Comptes, la commission de contrôle des banques…

Qu’est-ce qu’une juridiction ? C’est un ensemble de tribunaux d’une même catégorie. C’est un espace (canton, département) où la juridiction a compétence. C’est aussi une catégorie d’affaires et d’infraction.

            Le Système des Tribunaux

             En France, il est extrêmement hiérarchique et cloisonné ; au début du XIX e, il existe la justice civile (qui gère en plus les affaires commerciales) et la justice pénale. La justice civile, s’adresse uniquement aux particuliers (ex les problèmes de voisinage), la justice pénale ne s’intéresse qu’au crime.

Dans un procès en pénal, l’état intervient dans le jugement sous-couvert du « ministère public ». La société au sens large (l’intérêt commun) est représentée par le magistrat du parquet (dit magistrat debout) à l’inverse, le magistrat du siège est celui qui juge de manière effective, celui qui tranche lors du jugement.

En cours d’assise : le siège fixe le nombre d’année d’emprisonnement. C’est à partir de l’an VIII post-révolutionnaire que différents degrés de juridiction virent le jour. Par exemple une affaire passe devant le tribunal correctionnel, une juridiction d’instance. Si le jugement ne convient pas, on peut faire rejuger l’affaire, la juridiction du second degré prend le relais et on rejuge une affaire une deuxième fois. Chaque juridiction possède un ressort, un domaine de compétences particulières ainsi qu’un espace délimité. La cour d’appel de Poitiers avait sous sa juridiction les quatre départements de la région Poitou-Charentes.

 La division tripartite de l’infraction

En préalable à la compréhension du sujet : tout écart à la loi est infraction. L’infraction est jugée en fonction de sa gravité et de sa nature. La gravité enjoint la peine encourue par l’auteur.

L’infraction la moins grave relève de la contravention. Une contravention est ainsi située entre l’amende et les deux mois de prison. Avant une contravention était jugée par le tribunal de Simple Police.

Le délit, géré par le tribunal correctionnel jusqu’en 1990, se voit réprimandé par une peine comprise entre 2 mois et un jour et 5 ans de prisons

Le crime est lui qualifié par des peines de plus de cinq ans de prison, il y avait aussi dans l’arsenal répréhensif les travaux forcés à perpétuité et la peine de mort. 

Parfois, les infractions étaient requalifiées. Cela consiste en une incrimination. Le viol à été requalifié de délit en délit grave avant de devenir un crime. A l’inverse, avant 1952, un vol simple passait devant le tribunal correctionnel. S’il un voleur récidivait en volant, son geste devenait un crime, il était donc passible de plus de 5 ans de prison pour de vol de pains dans une boulangerie…

B)   les Sources Imprimées

Les sources sérielles sont les sources quantitatives. Ce sont les informations que l’on peut dénombrer, quantifier et rassembler en série. En France, on dispose de deux grandes séries :
 

Le compte général de l’administration de la justice criminelle. Il s’agit d’un volume annuel dont la première parution date de 1827 ce qui fait de la France le second pays à avoir archivé les sources judiciaires. La dernière parution à eu lieu en 1974, après cette date, les informations données aux archives ne venaient pas de la Justice mais de la préfecture de Police.

On prend donc les chiffres disponibles dès 1825, cette statistique judiciaire a donné une vision d’ensemble de la justice sur tout el territoire. Les deux extrêmes au niveau des sources sont : la Seine pour l’importance des productions et la Corse, pour le peu de documents judiciaires en émanant.

Le compte général de l’administration et de la justice civile, en 1931. Ce document prend en compte les magistrats et s’intéresse au rythme d’activités des tribunaux.

Publié dans premier semestre

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